Aperçu de tous les blogs

Du Colloque de Genève de l'Association des démographes de langue française II

Felix Bühlmann, université de Lausanne (Fondation suisse pour la recherche en sciences sociales FORS) et responsable du Rapport social et générationnel 2012 – «Relations intergénérationnelles»: impressions du Colloque de Genève de l’Association des démographes de langue française (21-24 juin 2010)

 

Partie 1

Du 21 au 24 juin 2010, l’Association Internationale des Démographes de Langue Française AIDELF s’est réunie à Genève pour son colloque annuel qui, en 2010, était placé sous le thème des relations intergénérationnelles. La démographie traite de l’évolution et de la structure de la population.

Au cours de ces dernières années, les démographes ont commencé à attirer l’attention du monde sur le vieillissement de la population. Dans les média des termes comme le «Complexe de Mathusalem» et la «Guerre des générations» ont eu une résonance importante.

Cependant, la recherche démographique est bien plus différenciée que les médias ne veulent le faire penser par leur conceptions généralisées. Le Colloque de Genève l’a confirmé de manière impressionnante. Venue d’Afrique francophone, de Belgique, du Québec et de France, une assistance nombreuse a apporté des contributions variées, discutées avec passion.

Les enfants au pouvoir?

Bien sûr, la thématique du vieillissement de la population n’était pas pour autant absente. Des ébauches de solution ont même été présentées: ainsi Paul Demeny, démographe réputé venu des USA, a fait une proposition non conventionnelle. Il donnait à penser qu’un des problèmes majeurs des populations vieillissantes résidait dans les rapports majoritaires en politique. En effet, tout comme celui de la population dans son ensemble, l’âge moyen des votants et des représentants parlementaires progresse dans les pays occidentaux.

De plus en plus, la majorité politique se constitue donc de personnes du troisième âge ou près de celui-ci, lesquelles n’ont aucun intérêt à voir restreindre les prestations des assurances vieillesse ou à repousser l’âge du départ en retraite. Par conséquent, selon P. Demeny, un remaniement s’impose afin d’accorder davantage de poids politique à la jeune génération professionnellement active. P. Demeny en appelle même à conférer un droit de vote pour les enfants jusqu’à l’âge de 18 ans, ce droit étant exercé par les parents.

Ceux-ci disposeraient donc, suivant le nombre de leurs enfants, de 3 ou 4 voix, voire davantage, ce qui aurait pour effet d’équilibrer à la longue les relations intergénérationnelles. Cette proposition originale ne fait pas (encore) l’unanimité. Souvent débattue dans les médias de renom, elle soulève notamment une question: la solution est-elle praticable?

 

Partie 2

La fatigue des parents, la honte des enfants

C’est notamment la comparaison entre divers pays et leurs communautés qui enrichit les colloques internationaux. Ainsi, les systèmes en place en un ailleurs peu connu chez nous, remettent souvent en question nos prétendues vérités et lieux communs, voire les contredisent – ce qui peut être bénéfique à nos propres idées.

Exemple: la contribution de Mamadou Ndongo Dimé de l’université du Québec. Pour les communautés d’Afrique occidentale, comme celle du Sénégal, la solidarité entre les générations constitue un principe fondamental. On attend des enfants d’âge adulte qu’ils s’occupent de leurs parents vieillissants et qu’ils subviennent financièrement aux besoins de ceux-ci lorsqu’ils ne peuvent plus travailler.

Cependant, il arrive que de tels principes – pourtant profondément ancrés dans les traditions – soient bousculés. M. Dimé est l’un des rares chercheurs à avoir examiné les conséquences de la crise économique actuelle sur les couches moyennes à Dakar, capitale du Sénégal. Et il a démontré qu’en raison de la crise, même les jeunes ayant bénéficié d’une bonne formation ne trouvent guère d’emploi; ils ne peuvent donc pas fonder de famille et dépendent de plus en plus longtemps de leurs parents – et a fortiori ne peuvent les seconder.

Ce renversement de la conception traditionnelle en matière de solidarité n’est facile à vivre pour personne: d’une part, les parents s’épuisent, obligés qu’ils sont de travailler plus longtemps et plus durement pour assister leurs enfants même d’âge adulte. D’autre part, cette situation est humiliante pour les jeunes et elle les fragilise moralement puisqu’ils se trouvent dans l’impossibilité d’assumer le devoir d’assistance envers leurs parents.

 

A suivre dans deux semaines: Le deuxième part.

 

Par Felix Bühlmann

Laisser un commentaire

Cela pourrait également vous intéresser

IG Plattform Werbung 6

Images de la vieillesse : contradictoires et pourtant omniprésentes

Les personnes âgées seraient têtues et les jeunes paresseux? Dans cette interview, le professeur Klaus Rothermund explique pourquoi les préjugés liés à l’âge sont tenaces, même s’ils sont souvent contradictoires. Il aborde également le rôle que jouent les attentes de la société quant à l’utilité, ainsi que les différences culturelles dans ce contexte, et montre pourquoi nous nous faisons en fin de compte du tort à nous-mêmes avec de telles représentations.

Kurtlampart

L’habitat intergénérationnel – un voisinage organisé centré sur le vivre ensemble

Tout le monde en parle. Mais quelles sont les caractéristiques fondamentales de l’habitat intergénérationnel ? Pour répondre à cette question, notre billet de blog se base sur le travail de recherche « L'habitat intergénérationnel dans la durée ». Nous expliquons les défis et nous présentons les facteurs clés favorisant la réussite de tels projets. Nous montrons enfin comment un engagement suivi permettra de créer et de pérenniser des types de voisinage vivant qui se distinguent par un esprit communautaire marqué.

Design Ohne Titel 1

Engagement et participation aux processus décisionnels: mesures contre la discrimination liée à l’âge dans l’espace public

Comment lutter contre l’âgisme dans l’espace public? Cette question était au centre d’une table ronde réunissant des spécialistes de la politique, du développement urbain et du travail socio-éducatif de la ville de Zurich. La discussion a clairement montré qu’un urbanisme inclusif et respectueux des générations n’est possible qu’en favorisant la collaboration au-delà des frontières professionnelles, la participation de tous les groupes d’âge et un dialogue ouvert.

S'inscrire maintenant ou créer un profil

Inscription Créer un profil